Laïcité et voile : notre argumentaire

Le dépôt à l’assemblée nationale dans les prochaines semaines du projet de loi sur la laïcité de l’État a amené la Fédération a travaillé dans l’urgence pour l’organisation d’une consultation de ses membres.

Nous ne pouvions en effet envisager de nous retrouver dans une situation où la Fédération des Femmes du Québec, organisme historique de lutte des droits des femmes, soit contrainte de rester en retrait d’un débat majeur qui s’annonce au Québec.

Au sein de la Fédération des femmes du Québec, cela fait déjà 10 ans que nous n’avons pas réévalué de façon officielle notre position dans nos instances. Nos premiers débats avaient abouti à la proposition de 2009 sur le voile.

Lors de notre dernière assemblée générale extraordinaire le 28 octobre 2018, nos membres avaient renvoyé en dépôt la proposition sur le voile.

Malgré que le débat était bien engagé, une information manquait aux membres, à savoir l’impact de cette nouvelle proposition sur la position prise par la Fédération en 2009.

La FFQ n’est pas la seule à revoir et repenser ses positions et la défense des droits des femmes.

Depuis l’AGE d’octobre 2018, la CSN (Confédération des Syndicats Nationaux) a pris une position qui fait avancer le débat, et qui va tout à fait dans le sens de la proposition de la Fédération des Femmes du Québec.

La consultation de nos membres a été un moment fort d’échanges. La consultation nous a permis de confirmer notre point de vue contre la fausse laïcité mise de l’avant par le gouvernement de la Coalition Avenir Québec. Elle nous a aussi permis d’appuyer notre point de vue pour lutter contre toutes les discriminations touchant les femmes, y compris les femmes musulmanes.

Tout au long de la préparation de cette consultation, nos membres ont reçu différents supports pédagogiques, dont cet argumentaire. L’argumentaire visait à répondre à la demande de nos membres quant à l’impact de la proposition sur le voile de 2018 sur la proposition sur le voile en 2009.

Voici les 10 points clés à retenir :

  • Entre 2009 et 2019, le contexte politique a changé et se traduit aujourd’hui par une hausse des crimes de haine à l’égard de la communauté musulmane dans un Québec post-attentat 29 janvier 2017.
  • Depuis 2009, la FFQ a tenu ses États Généraux en 2013 et affirmé son concept d’agentivité et d’intersectionnalité. Cela signifie que nous devons soutenir toutes les femmes, sans porter de jugement sur leurs choix.
  • La position de 2009 aurait conduit la FFQ à ne soutenir que les enseignant.e.s et les éducateurs/éducatrices du CPE dans le cadre du prochain projet de loi du gouvernement Legault.
  • La position de 2009 doit être réévaluée à la lumière de l’évolution des dynamiques de pouvoir au Québec entre la population majoritaire et les populations minoritaires. Aujourd’hui les rapports de force de la société québécoise pèsent sur les femmes racisées, et parmi elles les femmes musulmanes.
  • En 2017, le gouvernement du Canada a nommé à la Cour suprême de la Colombie-Britannique la juge Palbinder Kaur Shergill, une femme Sikh portant le turban. Le port de son turban ne l’empêche pas de respecter son devoir de neutralité dans l’exercice de ses fonctions.
  • Alors que la laïcité de l’État pourrait être amélioré, le projet de la CAQ s’oriente vers une restriction injustifiée des libertés religieuses des individus qui vise particulièrement les femmes. Une telle orientation laisserait craindre des dérives dans une restriction toujours plus accrue de ces libertés, mettant au banc de la société des femmes déjà en situation de discrimination.
  • Depuis 2009, le contexte sociopolitique du Québec a tellement évolué que même l’un des deux co-présidents de la commission Bouchard-Taylor, Charles Taylor, a fait volte-face sur la recommandation d’interdire les signes religieux pour les personnes exerçant des fonctions dites coercitives en réaction à l’attentat du 29 janvier 2017.
  • La laïcité concerne la séparation entre le politique et le religieux (et non la restriction des droits et libertés fondamentaux des individus) et est un principe d’organisation juridique qui, justement, déclare l’État incompétent pour juger des pratiques cultuelles (et vestimentaires)
  • Forcer une femme à se dévêtir n’est pas plus féministe que de forcer une femme à se couvrir.
  • La FFQ lutte pour l’égalité pour toutes les femmes et entre toutes les femmes.

Le lien de l’argumentaire de 9 pages dans son intégralité.